06 novembre 2025
Invité surprise de la 10e édition du Festival International du Film de Comédie de Liège, Jean-Marc Barr a rejoint sur scène Jean Reno, son complice du Grand Bleu. L'occasion pour l’acteur révélé par Luc Besson de revenir sur sa carrière, ses choix radicaux et son regard libre sur le cinéma contemporain, au micro de Manuel Houssais pour La Radio du Cinéma.
Une vocation européenne née d'une révolte
"Je suis un clown, je ne suis rien". Loin des projecteurs hollywoodiens, l’acteur a bâti sa trajectoire comme une quête philosophique. Né sur une base américaine en Allemagne, ayant grandi entre les États-Unis et la France, il quitte son passé militaire et catholique sous l'ère Reagan. "Quand Reagan a été élu, j’ai su que je devais partir". Sa destination ? L'Europe. Son inspiration ? Henry Miller, Jean-Luc Godard, et cette envie viscérale de liberté artistique.
Le Grand Bleu : un bonbon pour les yeux... et un passeport artistique
Si le rôle de Jacques Mayol a fait de lui une icône, Jean-Marc Barr refuse le confort des étiquettes. "Le Grand Bleu m’a permis de continuer cette quête de cœur", confie-t-il. Peu reçu en Angleterre et aux États-Unis, le film trouve son public en France. Jean-Marc Barr y voit une chance : "Je pouvais le regarder autrement". Le succès devient tremplin. Il délaisse les sirènes de l’industrie pour des choix radicaux, rêves de cinéma comme espace de liberté. Une démarche à contre-courant d’une époque de plus en plus formatée.
De Lars von Trier à la trilogie de la liberté
Sa collaboration avec Lars von Trier est décisive. D’Europa à Breaking the Waves ou Dogville, Jean-Marc Barr partage une vision du cinéma comme laboratoire existentiel. "Fais des fautes, suis son cœur", se souvient-il du mot d’ordre de von Trier. Ce goût du risque le pousse à réaliser, avec Pascal Arnold, une trilogie libre : Lovers, Too Much Flesh et Being Light, tournés sur trois continents avec des moyens réduits. Des films engagés sur l’amour, la sexualité, la liberté. "Un jeune m’a dit : Too Much Flesh a changé ma vie".
Jean Reno, une fraternité au-delà de l'écran
Retrouver Jean Reno au Festival de Liège, c’est raviver la mémoire d’une alchimie rare. "On a appris l'apnée ensemble", raconte Barr. L’intensité du tournage du Grand Bleu, la fraternité forgée sous la mer, reste intacte. "On était jeunes, beaux, indomptables", glisse-t-il, non sans émotion. Aujourd'hui, chacun a suivi sa route : Jean Reno vers le succès international, Jean-Marc Barr vers un itinéraire d'auteur. "Il faut jamais se prendre au sérieux, je suis une illusion".
Un regard désobéissant sur l'époque
À 64 ans, Jean-Marc Barr poursuit sa quête, à contretemps. "Je prépare un Hamlet". Il cite "Le Genou d'Ahed" de Nadav Lapid (2021) comme un électrochoc : "Enfin un film qui respire". Le divertissement ne suffit plus. Il veut vibrer, sentir, transmettre à son fils de 10 ans une idée de la vérité. "Quand on n’est rien, on est tout", conclut-il en invoquant Shakespeare. Le cinéma, pour lui, reste un lieu de combat poétique et politique.
Jean-Marc Barr était l'invité surprise de la soirée d’ouverture du Festival International du Film de Comédie de Liège le mercredi 5 novembre 2025, au Forum de Liège. Il a rejoint sur scène Jean Reno, l'invité d'honneur, pour une séance riche en émotions et en souvenirs du Grand Bleu.